“Hookilpenn” : c’est le nom qu’a donné Emilie Perez à son dernier né : un crochet de sécurité permettant d’attacher son licol en corde sans effort.

Aujourd’hui, j’interview Emilie sur la création de ce produit et le développement de Perez sellerie au sein de laquelle elle s’attache à développer des produits innovants. Vous connaissez le Kilpenn (lien) ? C’est Emilie qui a imaginé cette têtière anatomique ajustable sur n’importe quel bridon !

Place à ma discussion avec cette pro de l’innovation équestre. 

Bonjour Émilie, merci de nous accorder de ton temps pour répondre à nos questions. Pourrais-tu tout d’abord nous parler de ton parcours ?

Bonjour Marie, alors tout d’abord je suis passionnée de chevaux depuis ma tendre enfance, mais également de loisirs créatifs. J’ai d’abord voulu être vétérinaire, je suis donc partie sur un bac scientifique mais une fois dans cette filière, un truc me manquait : la créativité. J’ai donc plus facilement vu mon avenir en tant que Sellier Harnacheur, qui mêlait mes deux passions. Je me suis formée au métier après avoir obtenu mon bac, à l’école de M Sarras Bournet en Haute Savoie. La formation se fait sur un peu plus de six mois, on y apprend les rudiments de la couture, les différents montages, les cuirs, puis on fabrique nos premières brides et licols, harnais et selles. Une fois tout cela acquis, j’ai décidé de m’installer en auto entreprise, avec une activité salariée à côté, le but était de créer, de perfectionner et de commencer à communiquer ! En 2012 j’ai mis ça de côté car j’ai eu un enfant, je suis partie à temps plein en salariée dans un secteur qui n’a rien à voir mais j’y ai managé une équipe, organisé le marketing, supervisé l’administratif, et c’est ainsi qu’en faisant toutes ces choses que je me suis rendue compte que j’avais peut être les compétence pour gérer moi même ma structure. En janvier 2014, me voilà donc à temps plein sur l’EURL Perez Sellerie, avec pour objectif de faire : du beau, de la qualité, des pièces uniques ou presque, en apportant un maximum de confort. 

Comment d’une activité de bourrelière harnacheuse es-tu passée au développement de produits innovants ? Continues-tu de fabriquer des bridons, brides ou licols sur mesure ?

C’est arrivé un peu tout seul, je pense que si on se dit “il faut que je crée une innovation” on arrive à rien. Les innovations font pour ma part suite à des réflexions sur mes fabrications ou à des expériences vécues. 

Le KilPenn par exemple est la suite d’un produit (la têtière semi continentale) que j’ai d’abord réalisé en cuir “rigide” et mousse, uniquement sur mesure, lui même inspiré d’un modèle de bride de l’armée Suisse d’il y a quelques siècles. 

Pour le moment la sellerie est un peu au ralenti, les bridons sont très chronophages et j’ai choisi de développer mes innovations en priorité. Le KilPenn et le HooKilPenn sont donc les deux produits sur lesquels je concentre mon énergie, par ce que si je ne le fais pas, personne ne le fera ! Je crois énormément en ces deux produits, les retours des utilisateurs sont là pour m’encourager dans cette voie ! 

Peux-tu nous parler de la genèse du Hookilpenn ? comment t’es venue l’idée ? utilises-tu couramment des licols en corde ?

Le HooKilPenn est la première innovation sur laquelle j’ai travaillé, pour deux raisons : la première est le nouage du licol, on peut voir une quantité de noeuds mal faits, qui glissent ou au contraire sont impossibles à défaire, adolescente j’aidais dans un petit élevage de Paint Horse et j’y ai rencontré les crochets en inox américain, tellement pratique ! La seconde c’est un peu plus malheureux, j’observais une séance de travail à la longe avec un cheval pas évident, licol corde et grande longe plate, à un moment de la séance le cheval a arraché la longe des mains du longeur, s’est échappé et s’est retrouvé dans la nature à galoper avec sa longe de 15 mètres derrière lui, marchant dessus… Heureusement il a fini par être récupéré sans grosse blessure mais pendant de longues semaines il est resté très douloureux niveau nuque, refusant tout contact. C’est après cela que j’ai eu l’idée d’un crochet en plastique qui soit pratique et qui ait un effet fusible pour libérer le cheval lorsque la tension devient trop forte. 

Quelles ont été les étapes du développement du crochet ? tu as lancé une campagne de crowdfunding en 2016, combien de temps s’est écoulé entre l’idée et la mise sur le marché de ce produit ?

Le développement à été long, très long ! J’ai eu cette idée en 2015. J’ai fait un partenariat avec un lycée local et des étudiants en BTS plasturgie ont travaillés avec moi à l’ébauche du crochets en respectant un cahier des charges. Fin 2016 je suis donc arrivée avec mon projet et ai lancé le crowdfunding. Un succès avec plus de 700 crochets pré commandés. Les plans 3D ont ensuite été testés pour avoir une estimation de la résistance : 30kg, la douche froide. Avoir un effet fusible oui, mais ne pas pouvoir résister d’une trentaine de kilo face à son cheval était inconcevable. 

Il a donc fallu tout revoir depuis le début ! Après ces modifications nous avons pu lancer le moule, sortir les premiers prototypes en différentes matières début 2019.

Pourquoi t’être orientée sur des matières plastiques ?

Le plastique a des propriété inégalées par d’autres matières, un rapport poids/résistance impressionnant ! Mon cahier des charges était simple : je voulais que le crochet soit léger (j’avais en mémoire les crochets inox américains que j’avais utilisé, leur poids était impressionnant et donc les “chocs” sur le cheval doivent être désagréable), un design tout en rondeur pour éviter tout risque de blessure, qu’il soit suffisamment résistant, puis qu’il soit déclinable dans de nombreuses couleurs. 

Pour respecter cela deux options, de l’aluminium usiné (avec un doute sur la résistance car c’est un métal souple) ou la multitude de plastique existants. 

Ayant des parents dans la plasturgie c’est cette option que j’ai naturellement choisi !

Peux-tu nous présenter les différences entre les 2 plastiques proposés pour tes crochets ? PA chargé verre vs Polycarbonate ?

Le polycarbonate (PC) est le plastique qui compose la quasi totalité des HooKilPenn. Il est résistant, ne se désagrège pas (testé aux UV, eau, eau de mer,...) et a une certaine “élasticité”. 

Le Polyamide (PA) chargé fibre de verre est un plastique qui comme son nom l’indique est chargé avec de petites fibre de verre dans diverses proportions (5,10,20, 30%,...) plus il est chargé plus il va devenir rigide mais plus il sera aussi cassant au chocs ! Ce matériau me permet d’avoir un modèle de HooKilPenn plus résistant pour notamment les chevaux lourds qui sont capables de développer beaucoup plus de force. 

Quels tests ont été effectués pour valider à la fois la solidité du produit permettant son utilisation dans le travail avec le cheval ET sa capacité à se tordre ou rompre en cas de très fortes tensions ?

Les tests ont été réalisés chez ComposiTiC, encore en local, ils disposent d’un banc d’essai étalonné par un organisme Européen certifié. Nous avons donc testé ensemble la résistance du HooKilPenn attaché à deux cordes de diamètre 6mm, dans son milieu naturel en quelque sorte ! L’objectif était de voir la résistance dans deux situations : la première le cheval qui se coince (longe emmelée dans les membres, rênes accrochées sur une branche,...) et qui va tirer de manière linéaire (augmentant sa force de plus en plus) et la seconde pour les chocs,  par exemple un cheval qui s’échappe au galop et marche sur la longe à chaque foulée, la tension est très brève mais très forte. 

Il en est ressorti que le polycarbonate étant un plastique souple se déforme au niveau du crochet du HooKilPenn, il ne rompt pas mais se tord jusqu’à libérer la corde. Le modèle en PA chargé verre lui casse net une fois arrivé à son point de rupture (plus haut que le modèle PC), il y a donc des morceaux à ramasser si il vient à casser. 

Comme tu le sais peut être Horse & Ropes est membre de 1% for the planet (1% de notre chiffre d’affaires est reversé à des assos environnementales). J’ai vu que tu proposais à tes clients la récupération des crochets cassés. As-tu eu des retours de clients dont le crochet s’est cassé suite à une forte tension ? et jouent-ils le jeu du recyclage du produit ?

Pour le moment non, mais chaque revendeur est informé de ce souhait de ma part ! Le soucis principal est que pour le moment, les revendeurs sont surtout sur la toile, ce qui ne facilite pas le dépôt des crochets cassés. A terme j’espère avoir un réseau suffisant pour que les utilisateurs puissent déposer leurs crochets usagés en sellerie localement et que une à deux fois dans l’année j’envoie à mes frais un “bon de retour” pour récupérer la collecte de chaque point. Le HooKilPenn vient de fêter sa première année, il est donc normal que cela ne soit pas encore en place, mais son accueil est très bon et je pense que cela devrait se finaliser dans les prochaines années. 

Le but de récuperer les HooKilPenn est de pouvoir faire une “boucle”, ils seront lavés, triés, broyés puis réinjectés en nouveau HooKilPenn en associant le broyé à une part de matière “neuve”. Avec ce système, on peut facilement offrir 3 à 4 cycles de vie avant un recyclage plus définitif car le matériau aura perdu ses propriétés mécaniques.

Le Hookilpenn a reçu le 1er prix des trophées de l’innovation du salon du cheval de Paris, félicitations !! Que t’a apporté cette distinction ?

Merci encore ! Ce premier prix était pour le coup très inattendu ! Les trophées de l’innovation c’était pour moi un test pour avoir un avis de la part de professionnels du secteur, innover c’est bien mais il faut aussi écouter et se confronter pour avancer. 

Le challenge de la prise de parole en public est aussi important pour un artisan comme moi qui passe plutôt la plus grande partie de son temps solo dans son atelier. 

Cela m’a apporté des contacts mais les choses sont très ralenties depuis le début de l’année avec les doutes sur l’épidémie puis le confinement, il faut prendre son mal en patience et espérer pouvoir reprendre là ou on en était dès que la situation se sera améliorée !

Enfin as-tu des conseils à donner à nos clients pour la bonne utilisation du hookilpenn ?

Je conseille ce montage qui n’est pas identique au nouage de licol habituel et qui permet au HooKilPenn d’être bien à plat en utilisation. 

Je recommande également si c’est possible de remonter le noeud de la petite boucle pour qu’il soit en contact avec le bas du pont du HooKilPenn pour ne pas avoir de risque de décrochage inopiné avec des chevaux à fort balancier. Attention par contre à bien décaler le noeud en symétrie de l’autre côté de la têtière.

Merci beaucoup Emilie pour tes réponses. Nous te souhaitons tout le meilleur pour la suite et plein de beaux produits innovants.

Merci Marie et je souhaite la même chose pour les créations Horse & Ropes ! 

Ce qui nous a convaincu de participer au crowdfunding lancé par Emilie et de commercialiser son crochet :

  • Pouvoir vous proposer un accessoire utile qui sécurisera l’utilisation du licol en corde et protégera leur cheval
  • Répondre à la demande des cavaliers d’Equifeel pour leur faciliter la pratique de l’équitation. Mais aussi de toutes les personnes porteuses de handicap pour lesquelles accrocher un licol en corde peut être une vraie galère
  • Proposer une multitude de coloris qui permettent de choisir le hookilpenn qui match avec le coloris de son licol étho
  • Valoriser la démarche écoresponsable de la sellerie en proposant un recyclage des crochets
  • Soutenir une entreprise artisanale innovante Française
  • Promouvoir le made in Bretagne… mon côté chauvine (vive les galettes mais pas que !!)

/!\ Pour finir, je souhaitais vous redire que même si vous utilisez un hookilpenn nous vous déconseillons fortement d’attacher votre cheval avec un licol en corde ou de lui laisser au pré.

Envie de découvrir ma présentation du hookilpenn à notre stand au championnat de France d’Equitation ? ➡️ Voici une vidéo réalisée avec Angélique de J'entraîne mon cheval.

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